Après 20 éditions d'une grande richesse et une interruption pour cause de COVID, le festival les Imaginales revient dans un format adapté et une nouvelle direction artistique. 

Après la tempête qui a suivi le départ de Stéphanie Nicot qui a fortement marqué de son empreinte et de son aura la programmation du festival pendant de longues années, c'est au tour de Gilles Francescano, illustrateur de son état, de relever le défi de cette succession difficile. 

Des fondamentaux conservés 

Les littératures de l'imaginaire restent le cœur du festival. Ici, les petites maisons d'édition et leurs grandes sœurs plus discrètes ont le plaisir de retrouver un public acquis et nombreux avec une forte présence de collégiens et de lycéens. 

Conférences d'auteurs, prix des collégiens et des lycéens, débats, expositions et happening comme du body painting sont autant de temps forts pour quelques 45 000 visiteurs attendus cette année. C'est aussi l'occasion  pour les lecteurs de rencontrer leurs auteurs de SF ou de fantasy préférés comme Morgane Caussarieu, autrice coup de cœur du festival dont les ouvrages ensanglantent les rayonnages des librairies et bibliothèques depuis une décennie. Vampires et autres créatures de la nuit sont de sortie sous sa plume, que ce soit pour public averti ou pour les adolescents et les jeunes adultes.
Les magnifiques Magic Mirror sont également de retour, permettant un voyage dans le temps et installant une ambiance unique pour les conférences et spectacles.

Les imaginaires

A Epinal, les pirates croisent les vampires, les loups garous, les princesses, les chevaliers, mais aussi les soldats des temps passés dans cette région que les conflits ont profondément marqué depuis 1870. Ils se retrouvent non seulement dans la littérature propice au mélange des univers mais également sur les stands proches, le cosplay ou encore les jeux de rôle qui ont leur grande bulle.

La ville du futur

Epinal, dont le nom provient du château construit sur un éperon rocheux qui permettait de surveiller l'axe stratégique de la Meuse, est une ville bordée de montagnes et de forêts. Les arbres et la nature y tiennent une place de premier plan et la ville est la plus boisée de France en ce qui concerne le nombre d'arbres par km². 
La mairie a également entrepris de réinvestir les bords de la Meuse pour les rendre accessibles aux habitants. Zones piétonnières et équipements devraient bientôt animer les bords de la rivière. 
Aussi, il n'est guère étonnant que les thématiques retenues pour cette édition soit la ville du futur, tant ce sujet est d'importance avec les bouleversements écologiques, économiques et sociaux qui s'annoncent comme autant de défis. 

Magdalena Pagowska lors de la conférence d'inauguration

Pour illustrer ce thème ambitieux, c'est Magdalena Pagowska qui a été choisie pour réaliser la belle affiche de cette année. Intéressée par la nature et l'environnement depuis son enfance, elle est persuadée qu'un bon livre ou une belle illustration peut faire changer les consciences et ouvrir les esprits à cet enjeu d'avenir. 

La programmation des conférences et des expositions tient également compte de ce sujet : le monde d'après ? Le changement comme élément narratif vendredi 26 mai à 14h, La ville dans les jeux vidéo 15h, Par delà les ruines : les futurs fantatsmes de la cité de Saint-Dié-des-Vosges dimanche 28 mai à 10h, Les institutions de la cité du futur : entre histoire et imaginaire à 12h, Les châteaux médiévaux conjugués au futur à 14h sont autant de propositions alléchantes qui, je l'espère, seront filmées et mises en ligne pour ceux n'ayant pas pu y assister. 

Laurent Gapaillard, Immeuble candélabre, 2022, encre de Chine et lavis sur papier, prêt de la galerie Daniel Maghen Paris

Du côté des expositions, il ne faut manquer sous aucun prétexte celle du dessinateur Laurent Gapaillard  au Musée départemental d'art ancien et contemporain. Sous sa plume exquise et inspirée se dessine avec minutie des cités gigantesques et organiques où la nature côtoie les anciens dieux et les civilisations perdues. Fantaisistes à la précision presque photographique, ses œuvres sont fascinantes d'inventivité et foisonnantes de détails. Une très belle découverte !
Plus sombres mais non moins envoûtantes, les œuvres de H.R. Giger vous attendent au BMI pour explorer les tréfonds de New York City déshumanisée et claustrophobique. 
Dans le silence,des bibliothèques présente le travail de François Meslet au Crédit Agricole. Ici le numérique a tout emporté et les bibliothèques oubliées de tous basculent peu à peu dans un monde entre deux. 
Enfin, Noir et Couleur présente à la Basilique Saint Maurice une exposition de photographies sur la ville du futur.

Les nouveautés

Sous l'impulsion de son nouveau directeur artistique et avec la fusion des Imaginales avec la fête des images qui se tient actuellement en ville en automne, le festival élargit sa base avec des images imaginaires venues compléter les lectures tout aussi extraordinaires. Les Imaginales trouvent alors une nouvelle dimension.
Ainsi, à partir de 21h30, les façades historiques de grands bâtiments s’animent de courts métrages réalisés par des élèves issus de trois écoles d'animation : les Gobelins, l'École Méliès et l'Ecole supérieure d'animation de Lorraine dont un des établissements se trouve justement à Épinal. Il s'agit d'un tremplin pour de jeunes artistes de l'animation afin de les lancer dans le mapping ou l’art d’animer et habiller de lumière les façades de bâtiments le plus souvent historiques. La ville d’Epinal est d'ailleurs bien décidée à créer un pôle d'apprentissage de cette technique si particulière pour offrir de nouvelles perspectives à ses élèves et aux élèves des écoles partenaires.

L'image animée s'invite également dans le festival en journée avec le magic mirror "Idolize" qui accueille le pôle immersif. Cette salle enchanteresse à la décoration début XXe siècle est l'écrin d'un projet ambitieux : le pôle immersif.

Réalité virtuelle et projet éducatif transmédia s'associent autour du projet Molo-Molo internet qui vise à enseigner aux élèves de collèges et de lycées les bonnes pratiques sur internet. Avec la petite tortue Babayagagogo, c’est la notion de cyber harcèlement qui est abordée. Un livre-CD pour les élèves, un spectacle, un kit d’animation pour les classes (2 niveaux en fonction de l’âge), des ressources en ligne et un film d’animation en stop motion de 15 minutes entièrement réalisé à Nancy

La BD et le manga prennent également plus d'envergure dans le festival afin d’élargir l’offre autour de l’illustration.

Le jeu vidéo, autre forme de récit imaginaire et d’images animées mais aussi propice à l’adaptation de fameux titres de la littérature fantastique, fait également son entrée dans le festival.

Pour un coût maîtrisé de 690 000€ dont 200 000€ financés par la ville, les Imaginales regroupe désormais deux festivals et poursuit son développement avec l’ambition affichée de conserver ses fondamentaux qui ont fait son succès. Avec un nombre de partenaires impressionnant et la présence de 95 maisons d’édition, de 103 auteurs, 12 universitaires et 27 illustrateurs, auteurs de BD et photographes, le festival affiche un beau programme. A voir si les nouveautés ont su attirer un nouveau public et convaincre les aficionados ; réponse très bientôt.

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