Stupeur et tramblements...
22 oct. 2010
Jean-Paul LAURENS, L'excommunication de Robert II le Pieux, 1875, H/T, Orsay, n°RF151
La première chose qui surprend quand on lit le titre de ce tableau, c'est le paradoxe entre le premier mot et le dernier, comment un roi pieux peut-il être excommunié? En fait c'est assez simple.
Robert II dit le pieux (V.972-1031), fils d'Hugues Capet, très proche de l'Eglise eut la malchance d'épouser en seconde noce sa cousine au 4e degré, Berthe de Bourgogne (v.964-1010), pratique alors assez répendue dans la noblesse, au moment où le pape Grégoire V dit le Grand renforce les régles de l'Église pour lutter contre l'hérésie, la simonie, le nicolaïsme, ... et impose des régles matrimoniales assez strictes puisqu'un mariage est déclaré nul si les époux ont un degré de parenté inférieur ou égal à 7.
Robert à donc été excommunié car il a refusé de répudier son épouse qu'il a toujours aimée. Ils sont donc excommuniés et l'interdit est jeté sur le royaume (présenté dans une autre toile).
Ici, Laurens choisit de représenter l'instant juste après la sentence pontificale. Comme souvent chez Laurens, ce n'est pas l'acte en lui-même mais ses conséquences qui sont mises en avant. Le cadrage oblique nous fait à la fois saisir le départ des prélats à l'arrière plan à droite, et la détresse du couple royal sous le choc de l'annonce.
Laurens déploie ici sa science consommée de la mise en scène (il était friand de thêatre), distillant le silence et le vide qui suivent les drames, seus,l quelques indices témoignent de ce qui s'est passé, le sceptre que le roi à laissé échapper et le cierge renversé (signe de l'abandon de l'Église).
Outre l'aspect thêatral de la mise en scène, ce qui frappe c'est la minutie des détails, la reconstitution du décors est quasi archéologique. En effet, Laurens fait partie des peintres qui ont fait de nombreuses recherches pour rendre leurs oeuvres les plus exactes possibles.
La suite de l'histoire est assez triste, puisqu'après plusieurs mois de réflexion, le roi s'est finalement résolu à répudier son épouse. Ce sont les conséquences de l'interdit qui ont le plus pesées dans ce choix, puisque lorsque le royaume est sous le coup de cette sentence, les offices religieux sont arrétés, les morts ne sont plus enterrés et les relations diplomatiques fortement réduites... L'excommunication était alors la plus grave sanction religieuse car elle remettait en cause le Salut de celui qui en est frappé.