Sorti discrètement sur les plateformes ADN et Crunchyroll fin mars 2021, Joran : The princess of snow and blood, scénarisé par Rika Nezu et Kunihiko Okada, est une histoire originale fortement inspirée (jusque dans le nom) des gekiga telle Lady Snowblood de Kazuo Koike. Ainsi, au fil des 12 épisodes, vengeance sanglante et trahisons se succèdent au fil du sabre de Sawa Yukimura. 

Japon 1931, le shogunat Tokugawa règne en maître sur un empire fermé sur lui-même. La restauration de l’ère Meiji n’a pas vraiment eu lieu et une nouvelle énergie, la « veine du dragon », permet au pouvoir de tenir en respect les nations étrangères comme l’Angleterre, qui, comme à son habitude, ne cesse de manigancer. Pourtant, les contestations dans la population se multiplient et la révolte gronde, chaque fois plus sauvagement réprimée. Mais ce qui inquiète le gouvernement, ce sont les agissements de Janome, un scientifique aux vues malsaines qui conçoit des chimères mi-humaines mi-animales. C’est là qu’intervient la beauté fatale Sawa Yukimura.

Un fidèle assassin… 

Sawa Yukimura est une Nue (prononcer nué), une experte en assassinat membre d’un groupuscule secret au service du Shoguna Tokugawa toujours en place. Dotée d’un sang bleu particulier qui lui permet de décupler sa force, son endurance et sa régénération lorsqu’elle entre en résonance avec son corbeau Nana, elle prend ainsi une forme rappelant les shinigami (dieux de la mort japonais). Elle est en effet la dernière survivante d’un clan pacifiste exterminé dix ans auparavant. Depuis, elle enchaîne les missions contre les dissidents au régime. Froide et distante avec tout le monde, même ses collègues ou sa petite sœur Asahi, elle suit aveuglément les ordres de Jin Kuzuhara qui l’a sauvée, accueillie et formée. 

… En quête de vengeance

Outre sa loyauté envers Jin Kuzuhara, ce qui motive réellement Yukimura est sa soif de vengeance. Chaque mission la rapproche de Janome, le scientifique dissident responsable de la mort de sa famille et de son clan. Janome, obsédé par les pouvoirs du sang bleu, n’a pas hésité à pratiquer au fil des ans un grand nombre d’expériences abjectes sur des cobayes humains. Il est proche de découvrir comment transférer les capacités du sang du clan de Yukimura à d’autres personnes, ce qui déstabiliserait le pouvoir en place, déjà bien contesté. 

Après des premiers épisodes assez classiques, le scénario fait un virage intéressant qui permet d’explorer plus finement la psychologie et le passé des trois personnages principaux, les faisant gagner en épaisseur. Yukimura, la femme fatale au tempérament de glace, opère un lent glissement qui la rend plus humaine et lui fait voir la vie sous un autre angle plus lumineux, tournant peu à peu le dos au cycle de la haine et de la vengeance. Asahi, sa petite sœur adoptive au lourd passé, est particulièrement attachante et fait preuve d’une grande intelligence émotionnelle pour son jeune âge, elle est le petit soleil de la série. Enfin, le ténébreux Jin Kuzuhara révèle des motivations toutes aussi surprenantes que ses actes.

Cette histoire originale est servie par un excellent travail de l’animation et du character design. Le jeune studio Bakken Record (fondé en 2019) a fait un excellent travail de ce côté-là avec de beaux personnages, des environnements soignés et surtout des combats d’un grand dynamisme. 

Les génériques de début et de fin, interprétés par Raise a Suilen, sont très réussis et collent parfaitement à l’histoire. 

Si l’ensemble du scénario se tient de bout en bout concernant Sawa Yukimura, plusieurs éléments ébauchés comme la contestation sociale ou le rôle des anglais dans les déstabilisations du pays auraient mérité un peu plus de place, tout comme les personnages secondaires que sont Makoto Tsukishiro et Elena Hanakaze dont on ne sait finalement pas grand chose alors qu’elles ont une grande importance dans les événements. La numérotation des dossiers donnant leur nom aux épisodes est également assez obscure. Cependant, que ce soit pour la réalisation de belle facture ou l’histoire, il serait dommage de passer à côté de cette série qui use de violence pour prôner l’importance de la vie. 

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