A la toute fin du mois de septembre, je me suis rendue au château d'Auvers sur Oise, dans le Val d'Oise, pour découvrir le nouveau parcours : Vision Impressionniste.

Château d'Auvers-sur-Oise-®GillesFey

Lorsque l'on évoque Auvers sur Oise, c'est l'image de Vincent Van Gogh qui s'impose généralement à notre esprit. Mais le petit village a accueilli un grand nombre de peintres impressionnistes. C'est pour promouvoir cette période d'intense foisonnement artistique que le département du Val d'Oise a conçu l'équipement culturel du Château d'Auvers sur Oise : un centre d'interprétation d'art impressionniste, ouvert depuis 1994.

Mais avant de vous parler de la nouvelle exposition, je voudrais vous présenter le château et ses jardins, que je ne connaissais absolument pas malgré plusieurs visites à Auvers Sur Oise.

Le Château

Construit vers 1635 dans un style italien par le financier Zanobi Lioni, le château subit une première transformation en 1662, quand il est racheté par Jean de Léry, un proche du jeune Louis XIV. Jean de Léry en fait un château à la française, notamment en modifiant le toit qui, de terrasse, est passé à pentu.

Nymphée

Au cours des XVIII et XIXe siècle, le château change de propriétaire à de nombreuses reprises. E1720, il appartient à la famille d'Espremenil. En 1756, une transformation complète est opérée. La façade nord, de style Louis XIII, est maintenue, mais au sud, on y adjoint deux pavillons supplémentaires. En 1765, il est revendu au prince Louis François de Bourbon-Conti, qui n'y séjourne qu'en de rares occasions et essentiellement lors de chasses. Il y fait tout de même batir un nymphée.

Par la suite, les bâtiments se dégradent. En 1779, M. Louis Claude Chéron de la Bruyère, député de l’Assemblée législative, l'acquiert. Emprisonné pendant la Révolution, puis libéré, il fut nommé maire d’Auvers, puis préfet de la Vienne en 1805. Son fils Henri, maire dès 1825, resta à Auvers jusqu’à la fin de sa vie et se consacra sans relâche au Château. Pendant son mandat, le Conseil décida que le pont et l’escalier du château seraient exemptés des prescriptions d’alignement parce qu’ils faisaient partie de l’ancien domaine du prince de Conti, "souvenir historique et ornement de la commune". Alphonse Chéron, troisième de la lignée, vendit le château à la famille Gosselin en 1882, qui le conserva jusqu’en 1939.

En 1987, le département rachète le château et entreprend de grands travaux sur le bâti et dans les jardins. Après plusieurs années de travaux, le domaine ouvre au public en mai 1994, par délégation de service public, avec l'exposition Voyage impressionniste. Au cours des récents travaux, des peintures murales du XVIIIe siècle ont été retrouvées en certains endroits et ont fait l'objet de restaurations.

Le Nymphée

Parfaitement conservé, voici la curiosité du château : le nymphée, construit par le prince de Conti, est situé sous l'orangerie nord. Cette cave artificielle circulaire, dont on longe le mur extérieur pour entrer dans l'exposition, est entièrement recouverte d’une mosaïque de coquillages et abrite une fontaine magnifiée par un puits de lumière. Marquant la propriété du prince de Conti, son monogramme orne les parois. Il est l'un des derniers nymphées, parfaitement conservé. Je suis un peu déçue car quand j'y suis allée le nymphée n'était pas ouvert et je n'ai pu le voir qu'à travers la porte vitrée.

Le restaurant

Le restaurant a également été réaménagé et porte maintenant le nom de nymphée auquel il est accolé. Le chef est toujours aux commandes et propose des plats de saison élaborés avec des produits locaux. 

Les jardins

Outre le château et son parcours, les jardins sont un élément important du domaine. Entre terrasses à l'italienne ornées de dentelle de buis, labyrinthe planté de charmilles, terrain boisé et verger composent un écrin de huit hectares. Les grandes terrasses haute et basse (cette dernière est appelée « Clos du Château ») sont reliées entre elles par un pont en pierre qui enjambe la rue de Léry. C'est assez étrange comme disposition, mais ça a son charme je trouve. L'ensemble est classé dans l’inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1987. Depuis plusieurs années, vers la mi-mai, les irisades mettent en avant ces fleurs plébiscitées par les peintres impressionnistes. Au moment où je me suis rendue sur place, les jardins étaient en travaux, et en plus il pleuvait, donc je ne me suis pas vraiment baladée (sniff).

iris-®chateau-auvers-sur-oise

En temps normal, plusieurs fleurs en lien avec le château ou les impressionnistes sont représentées dans les lieux dont :

  • L’iris « Château d’Auvers-sur- Oise » créé par Richard Cayeux en 2004. Séduisant amoena aux pétales blanc pur, infusés d’abricot très clair à l’éclosion, et sépales abricot cuivré portant de vives barbes mandarine. Sépales fermes, proches de l’horizontale et bordés de petites ondulations serrées. (Semis cayeux 95 49A).

  • L’iris « Voyage Impressionniste » créé par Pascal Bourdillon en 2012. Très parfumé, d’une hauteur de 90cm, sa floraison est de mi-saison à tardive. Il est agrémenté de pétales glycine et sépales violet magenta qui deviennent plus clairs vers la barbe ocre. Les parents sont Swingtown (mère) et Silverado (père) par pollen.

  • La Rose des impressionnistes. Créée en 2015 par le célèbre obtenteur du NIRP international Michel Adam, cette rose parfumée fleurit de mai aux gelées. Ses couleurs lumineuses, jaune, orange et rose sont un véritable hommage à la palette impressionniste.

  • le fuchsia « Château d’Auvers-sur-Oise » créé par Marcel Delhommeau en 2012. Très précoce, sa floraison, généreuse et compacte, s’étale du printemps à l’automne. Les fleurs sont rose fuschia au début puis s’éclaircissent en s’épanouissant. Les parents sont Margaret Roe (mère) et Regia Reitzii 4514.

 

L'exposition

Après plus de vingt ans d'exploitation, il était temps de proposer un nouveau projet. Après une nouvelle année de travaux, le château ouvre de nouveau ses portes avec une nouvelle présentation : Vision impressionniste, mêlant projection et exposition de peintures pour une immersion sensorielle.

Le parcours est composé de huit salles de projection entrecoupées d'expositions de tableaux prêtés par le département, et d'autres surprises. Chaque salle évoque un aspect de la création impressionniste, les liens des artistes entre eux, avec le train, avec le village et ses habitants, la couleur, la réception critique, etc. Les salles de projection utilisent une technologie de mapping vidéo sur les murs, sols et plafonds, qui permet d’immerger le visiteur dans la création, couplé à une bande son reprenant des extraits de lettres et d'articles de l'époque. Il est important de noter que lors de chaque projection, le tableau est montré à un moment ou à un autre à sa taille originale. Chaque séquence dure entre 5 et 8 minutes et quelques minutes d'attente les séparent. La muséographie est beaucoup plus sobre que dans la précédente exposition. Dans un autre style, ça me rappelle le mémorial Jeanne d'Arc de Rouen, ouvert il y a quelques années.

Les salles d'expositions, plus classiques, montrent pour leur part des tableaux impressionnistes prêtés par le département et, pour certains, jamais exposés précédemment. L'on retrouve même la reconstitution d'un atelier d'artiste avec des peintures originales et des couleurs dépoque prêtées par la maison Lefranc & Bourgeois.

Des QR-codes présents dans chaque salle de projection permettent d’accéder à du contenu enrichi, dont des interviews de spécialistes pour ceux qui le souhaitent. Il y a trois interviews par salle, soit 27 en tout il me semble (je dois avouer que je ne les ai pas toutes regardées).

Pour mettre au point le parcours d'exposition au plus près de l'esprit des artistes, ce ne sont pas moins de 600 sources littéraires qui ont été étudiées par les équipes du projet pendant de longs mois.

Véritable centre d'interprétation sur l'art impressionniste, le Château d'Auvers sur Oise ne revendique pas le titre de musée mais bien celui de lieu culturel. L'ensemble du parcours est accessible aux personnes à mobilité réduite grâce à des places de parking supplémentaires, interphones spéciaux, rampe d’accès dotée d’un fauteuil élévateur, chemin de pavés sciés. Un parcours a été également pensé pour les malvoyants, et intègre notamment une signalétique en braille.


Personnellement, j'ai bien apprécié l'ensemble formé par ce château/jardin/exposition numérique. Étant très sensible à la médiation numérique, je trouve qu'il y a plusieurs bonnes idées dans ce parcours. Je me doute pourtant bien que l'utilisation des tableaux ou de détails en mapping vidéo peut perturber les puristes, plus habitués à la section impressionniste du Musée d'Orsay. Pourtant, ici, j'y vois plus une invitation à l'émerveillement tant les couleurs sont chatoyantes. Et l'utilisation de techniques encore peu rependues donne une impression un peu magique. Je me demande cependant comment cette exposition va évoluer dans les 14 prochaines années de son exploitation...

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