Le peuple Loup de Tomm Moore et Ross Stewart le 16 décembre au cinéma
07 nov. 2020C’est le 16 décembre 2020 que sortira au cinéma le long métrage d’animation Le Peuple Loup de Tomm Moore et Ross Stewart qui avaient déjà œuvré tous les deux sur le magnifique Brendan et le secret de Kells.
En ce sombre XVIIe siècle, le lord protecteur anglais tient son fief irlandais d’une main de fer et veut étendre les terres cultivables. Mais voilà, pour ce faire, il doit abattre les arbres de la forêt et se heurte à la résistance des loups menés par un étrange duo tout droit sorti des légendes anciennes : les Wolfwalkers ! Robyn, une petite anglaise de 11 ans qui a déménagé avec son père chasseur en Irlande, décide de braver les interdits pour le suivre dans sa traque, c’est alors qu’elle fait une rencontre qui va changer sa vie.
La jeune fille et les loups
Le Peuple Loup est basé sur une triple dualité dont la plus importante confronte l’Homme à la Nature. Le Lord protecteur anglais, qui partage quelques traits physiques et surtout moraux avec le Gouverneur Ratcliffe dans Pocahontas, n’a qu’une idée en tête, abattre les loups qui l’empêchent de raser la forêt pour augmenter le nombre de terres agricoles et donc les rentrées d’impôt. De son côté, la meute, menée par Mébh MacTíre et sa mère, cherche à défendre son territoire ancestral. Pourtant, les Wolfwalkers, à mi-chemin entre les deux mondes, montrent bien qu’il n’existe pas d’antagonisme naturel entre l’homme et le reste du vivant, et que c’est en apprenant à se connaître les uns et les autres que les tensions s'apaisent comme l’avaient compris les anciens irlandais qui avaient conclu un pacte avec la meute.
Un second vernis vient se superposer à cet affrontement. La religion anglicane du Lord Protecteur s’oppose aux anciennes croyances animistes celtes. En voulant dompter la Nature et en réfutant comme sorcellerie les Wolfwalkers, le Lord protecteur met à mal le fragile équilibre qui existait et conduit à une situation dangereuse voire tragique pour tout le monde (Recoucou Radcliff). L’on voit alors comment les croyances anthropocentrées de l’Homme le coupe de la nature et le pousse à la détruire, n’apportant que le malheur.
Où se situe le bien ?
Robyn Goodfellowe, la jeune héroïne du film, est confrontée à plusieurs moments de l’intrigue à des choix cornéliens. Enjouée et peu obéissante (voire même tête à claques) mais brave et bonne camarade comme l’indique son nom, Robyn ne comprend pas tous les interdits que lui imposent son père et sa nouvelle vie. Elle se retrouve ainsi en danger à plusieurs reprises. Pourtant, c’est en bravant les ordres de son père et du Lord protecteur qu’elle fait la rencontre de la jeune Mébh. Cette rencontre inattendue va changer la vie des deux jeunes filles, mais pas seulement. Au contact de Mébh, Robyn comprend qu’elle n’est pas faite pour une vie de soumission, enfermée dans un lugubre château à faire des tâches répétitives. Pour faire ce qui lui semble juste et jouir de sa liberté, Robyn doit prendre des décisions parfois maladroites et s’opposer à certaines figures d’autorité au risque de chagriner son père.
L’on retrouve quelques poncifs déjà présents dans les films de Tomm Moore que sont le Chant de la mer et Brendan et le secret de Kells. Le jeune héros orphelin, l’animal de compagnie qui le guide, la découverte du monde magique, l'enfant doté de pouvoirs en lien avec l’autre monde.
Si le fond est complexe et riche, la forme est tout aussi savoureuse avec la patte graphique bien reconnaissable des deux compères. Un dessin tout en rondeur des personnages, des couleurs chatoyantes et une flore et une faune luxuriantes qui révèlent une poésie et une maîtrise trop rare .
Pour la bande son, Tomm Moore a de nouveau fait appel à Bruno Coulais et au groupe Irlandais Kíla pour des compositions parfaitement en phase avec la thématique du film et aux sonorités délicatement irlandaises.
Si j’ai bien aimé le film et retrouvé la magie des productions précédentes, je dois reconnaître que j’ai été moins transportée, peut-être y a t’il trop de similitudes narratives avec Brendan. J’ai également trouvé que les racines irlandaises sont un peu moins présentes.
Cependant, Le Peuple Loup est un conte des plus intelligents qui ravira les enfants dès 6 ans. Il puise dans la magie du folklore celte et montre combien il est important de faire ses propres expériences et parfois de braver les interdits pour aller vers l’autre. Qu’il ne faut pas s’enfermer dans une doctrine, aussi ancienne soit-elle, et réfléchir par soi-même à ce qui est réellement important et où se situe le bien. C’est également une fable empreinte d’amour pour la nature et ses merveilles.