Gyoda : la ville des tabi
23 janv. 2019La ville de Gyoda, dans la préfecture de Saitama, se trouve à environ une heure de train de Tokyo, vers le nord. Elle est ponctuée de nombreux sites intéressants du point de vue historique et culturel. Je vous en parlerai dans une série d’articles à venir. Pour débuter cette série donc, je vous propose de découvrir les tabi, ces chaussettes traditionnelles si caractéristiques qui sont un des emblèmes de la ville.
I] Un peu d’histoire
Au cours de leur histoire, les tabi ont quelque peu évolué. Initialement en cuir épais retenu à la cheville par un lien, elles sont aujourd’hui en coton japonais (c’est très important) fermées par de petites attaches ongulaires en métal. Il est assez rare de voir des modèles anciens, mais cela est possible dans les collections du château musée de la ville, appelé Oshi ou encore dans le showroom de certaines marques de Gyoda.
La ville de Gyoda étant à cette époque principalement rurale, pour assurer un complément de revenu lors de la saison froide, les familles ont commencé à fabriquer des tabi dans le cadre de l’artisanat domestique, comme le faisaient les paysannes françaises avant l’avènement des filatures industrielles. Peu à peu, cette activité a prospéré, des usines ont ouvert leurs portes et les tabi sont devenues la première production de la ville. Des (jolis) entrepôts sont encore visibles dans la ville. Au XIXe siècle, la production de tabi est à son apogée, des machines sont importées d’Europe ou sont fabriquées sur place, certaines sont toujours utilisées de nos jours ! Pour accélérer la production, les travailleurs emportent des repas faciles à manger (dont je vous parlerai une prochaine fois) le zeri-furai et le furai qui sont respectivement une croquette de purée de pomme de terre aux légumes et épices, et une galette de légumes parfois garnie de soba. Zeri-furai et furai sont devenus les plats emblématiques de la ville et les mascottes officielles de la ville.
Aujourd’hui encore, Gyoda produit 80% des tabi fabriquées au Japon !
II] Fier de son artisanat
Avec la mécanisation, beaucoup de tabi en maille sont produites à l’étranger, mais il reste tout de même six usines à Gyoda qui fabriquent encore les tabi traditionnelles en tissu, grâce au savoir faire de ses employés et à de nombreux emporte pièces. Il faut trois pièces de tissu par chaussette, assemblées via les machines à coudre dont les plus anciennes remontent au début du XXe siècle. Chaque tabi est vérifiée à chaque étape de montage.
Ces usines, classées Japan Héritage sont fières de leur savoir faire et défendent l’aspect artisanal de leur production, ainsi que la qualité des matériaux.
III] Un engouement toujours vivace et diversifié
L’usage des tabi artisanaux est toujours très répandu, que ce soit dans les temples, les arts martiaux ou encore lors du port du kimono de cérémonie. Les tabi pour les rikishi (sumo) sont un peu particulières car elles ne couvrent que l'avant du pied, rappelant une forme ancienne.
Hommes et femmes portent des modèles similaires parfois ornés de motifs traditionnels ou kawaii. Il existe également des versions colorées ou encore pour l’hiver. Il est possible de demander une personnalisation avec broderie ou autre.
Plus récemment, à la demande de clients sportifs, des baskets de running tabi ont été créées. Selon les amateurs, je ne les ai pas essayées, elles sont plus légères que des baskets traditionnelles. Elles ont rapidement rencontré le succès et depuis, chaque année, ces petites séries sont très rapidement épuisées.
Pour acheter des tabi traditionnelles, il faut tenir compte de la longueur du pied (en cm). Il existe des tableaux de correspondance pour les tailles. Il faut également faire attention à la taille de la cheville pour ne pas se sentir compressé. A taille identique, les hommes ont ½ pointure de plus.
Pour ma part, je trouve intéressant, voire amusant, de décaler une tenue avec des tabi. La première fois que j'ai enfilé des tabi, j'ai trouvé ça un peu étrange, mais je m'y suis très vite habituée, et si comme moi vous n'aimez pas la sensation de frottement des tongs, les tabi sont une bonne solution.
Visuels : (c) Sandra B.