Tokyo Ghoul t1, âme sensible s’abstenir…
23 août 2013Les productions portant sur le thème du zombie ne manquent pas ces derniers temps. Tokyo Ghoul prend à contre-pied cette mode du zombie ravageur, sanguinolent ou comique, pour nous proposer une intrigue qui pose des questions éthiques. Avec les goules comme colonne vertébrale de son récit, l’auteur Sui Ishida apporte une lecture modernisée de ces créatures folkloriques mangeuses d’homme.
A Tokyo le jeune étudiant timide Ken Kaneki mène une vie ordinaire avec son ami de toujours Hide. Cependant, dans la ville rodent, on ne sait pas trop comment ni pourquoi, des goules qui seraient à l’origine de meurtres anthropophages particulièrement horribles. Ken, notre héros, dont les centres d’intérêt portent essentiellement sur les livres et les filles, fera malheureusement la rencontre d’une de ces goules modernes. Après un combat perdu d’avance et quelques péripéties, celui-ci se réveillera avec un organe de son agresseur. C’est avec cette transplantation d’organe que les ennuis de notre héros commencent.
Ce manga raconte la lente descente aux enfers de ce jeune étudiant sans histoire, qui se retrouve pour son plus grand malheur mi-humain, mi-goule. Une position qui le pousse à ressentir les mêmes envies anthropophages que les goules, mais également une répugnance pour cette faim macabre. Il devient ainsi un être hybride, coincé entre ces deux races, l’une pourchassant l’autre pour se nourrir, tout en se fondant à l’intérieur de la société humaine pour pouvoir passer inaperçue.
Tout au long de ce premier tome, nous découvrons l’agonie de ce héros qui se transforme peu à peu. De ce fait, une attention particulière est portée à sa faim qui le pousse vers la chair humaine, et à cette question éthique qui rendrait fou n’importe quelle personne normalement constituée. Ainsi, dans cet univers de goule où les humains ne sont que du gibier, notre héros devra se trouver une place. La dignité de son humanité s’opposera sans cesse à sa propre survie. Ce qui l’amènera à être en proie à de violentes expressions de son animalité naissante. Une animalité qui lui donne l’impression de concevoir les humains de la même manière que les goules, c’est-à-dire, comme de la bonne chair.
Dans sa structure, le manga est plutôt bien équilibré. Sa lecture se montre fluide, et les nombreuses scènes de combats rythment, avec une violence macabre, l’enlisement de Ken dans son combat pour sa dignité d’être humain. Les designs des personnages et des goules ne sont pas une surprise, la recherche graphique est somme toute classique. Même si les dessins ont cet esprit authentique à première vue (grâce notamment aux coups de crayon), le connaisseur trouvera très vite une différence de qualité entre les planches. Les compositions de celles-ci sont claires, mais toujours très simples. En somme, ne cherchez pas la claque visuelle avec ce manga, là n’est pas la question. L’auteur assure une réalisation graphique passe-partout qui ne marquera pas l’histoire du manga, mais qui aura le mérite d’être lisible au premier coup d’œil.
Ce qu’il faut rechercher est plutôt cette profonde question éthique, concernant le cannibalisme sur fond de survie de l’espèce et du retour aux pulsions animales. Cela aura pour effet de rappeler très fortement les scènes de cannibalisme assumé du roman post-apocalyptique the Road de Cormac McCarthy publié en 2006 aux États-Unis chez l'éditeur Alfred A. Knopf est le film du même nom de John Hillcoat sorti en 2009. Il faut aussi voir le manga comme un essai sur cette question de la lente transformation du héros hybride qui ne sait plus ce qu’il est vraiment. L’auteur fait d’ailleurs allusion à La Métamorphose de Kafka comme référence classique. Nous pouvons également voir des références comme La Mouche noire de Kurt Neumann sorti en 1958, et récemment le film District 9 de Neill Blomkamp sorti en 2009.
Au-delà de l’utilisation de goules comme base de l’histoire de son manga, l’auteur Sui Ishida nous pose directement une question dérangeante : « Jusqu’où irez-vous pour survivre ? ». Afin d’y répondre, il nous propose ce « voyage psychologique romancé » dans les pensées de son héros qui incarne si bien l’hybride cher à tout bon roman de fantastique opposant deux races.
Premier tome d’une série qui en compte pour l’instant sept, ce manga est publié depuis 2011 au Japon dans le magazine Weekly Young Jump.
Tokyo Ghoul - Tome 1 : L'homme est-il vraiment au sommet de la chaîne alimentaire ?
http://www.glenatmanga.com/tokyo-ghoul-tome-1-9782723495615.htm
Collection Shônen
Format : 130 mm x 180 mm
Faconnage : Souple
224 pages
Nombre de tomes associés : 14 - série terminée au Japon
Editeur Japonais : Shueisha
Paru en août 2013
EAN : 9782723495615
ISBN : 978-2-7234-9561-5
Hachette: 4128716
Prix: 6.90 €