Corps Solitaires tome 1 : dissonances matrimoniales
11 nov. 2020Les éditions Kana font une incursion surprenante mais réaliste dans la vie de couple de (paraît-il) nombreux japonais. Avec Corps solitaires de Haru Haruno, c’est la question des couples sexless qui se pose et des répercussions de cette situation sur les relations entre les deux partenaires.
Michi, pétillante trentenaire, est mariée depuis plusieurs années à l’homme qu’elle aime. Mais voilà, sous le masque du gentil petit couple, chacun souffre d’une situation persistante : depuis deux ans ils n’ont plus de relations sexuelles aux grand désespoir de Michi qui se fait de plus en plus pressante. La situation bascule le jour où elle se confie à un de ses collègues de travail qui s’avère être dans la même situation.
Dissonances
Michi aime son mari et lui semble lui porter de l’affection, cherchant régulièrement à lui faire plaisir. Pourtant, leurs liens se distendent peu à peu. Ils ne sont plus en phase physique et psychologique. Michi ne comprend pas l’attitude de son époux et celui-ci se sent étouffé par les attentes de sa femme. Elle trouve du réconfort en se confiant à Niina, son avenant collègue qui se trouve être dans la même situation.
Et l’amour dans tout ça ?
Michi en est persuadée, elle aime son époux , elle tente de lui parler à plusieurs reprises dans l’espoir de comprendre l’origine de la situation et cherche en vain à rallumer la flamme. De son côté, le séduisant et empathique Niita vit la même situation et ne sait comment réagir face à l'indifférence de son épouse. Pourtant, lui aussi l’aime et souffre de la situation. Plusieurs questions se posent alors, peut-on aimer sans désirer ? Qu’est-ce qu’un couple ? Qu’est-ce qui tue l’amour ? Et comment sortir de cette situation de souffrance pour les deux partis, car si Michi souffre, Yo, son mari également.
Fait de société
Corps solitaires évoque sans fard une situation que semble rencontrer de nombreux couples japonais : la baisse de libido d’un des partenaires jusqu’à l'arrêt total de tout contact physique. Nombreux sont les articles et reportages qui parlent de ce phénomène et de son corollaire, la chute de la natalité qui a enregistré son plus bas historique en 2019 avec moins de 900 000 naissances pour un pays comptant 126 000 000 d’habitants.
Haru Haruno illustre ce phénomène en montrant la souffrance des partenaires. Elle ne porte pas de jugement et ne donne pas de recette miracle mais dissèque délicatement le lent glissement des relations et pose des questions aussi sociales que culturelles sur le couple.
Avec un dessin délicat et épuré, des détails subtils, Haru Haruno parvient à transmettre les émotions de ses personnages, leur peurs, leurs souffrances, leurs interrogations.
Corps solitaires est un titre délicat qui traite d’un sujet social sensible. L’on se demande ce qui va naître du rapprochement entre Michi et Niina, une solide amitié ou une passion torride ? Le développement psychologique des personnages devrait tenir une place de choix, et il serait intéressant de voir un peu plus les réactions de Yo et ce qui a conduit à cette situation. Je ne pense pas que l’autrice aura l’occasion de mener une étude sociologique, mais il est intéressant d’avoir le point de vue japonais et peut être quelques éclaircissements sur la mentalité japonaise et sur ce phénomène pas si récent en fin de compte.
ISBN / EAN : 9782505084662
Format : 127 * 180
Nombre de pages : 168